Pendant de longues années, j’ai dessiné pour le plaisir sans me poser de questions. Après tout, j’avais un emploi à temps plein, un salaire fixe ; le dessin me servait d’exutoire à des journées de boulot épuisantes et stressantes. Jusqu’au jour où Jo Ann m’a commandé un dessin : un portrait de Littlejohn, héros de La réelle hauteur des hommes, que j’ai d’abord échangé contre le roman en question, parce que je n’imaginais pas faire payer mon art, n’est-ce pas ?
Puis elle m’a sollicitée à nouveau et demandé combien de demanderais comme paiement. Et là, angoisse! Quelqu’un voulait acheter un de mes dessins. Je n’avais plus le choix : je devais accepter de devenir artiste professionnelle.
Littlejohn, mon dernier dessin en amateure avant de devenir artiste professionnelle
Depuis, j’ai créé mon activité, j’y ai adjoint un statut de micro entrepreneure et j’ai créé ma boutique d’art en ligne. Forte de mes recherches, des formations et de mon expérience sur la question, je te propose d’en apprendre plus sur les formalités administratives nécessaires pour te lancer.
Que signifie devenir artiste professionnelle ?
Concrètement, ça veut simplement dire que je suis répertoriée par l’Insee sous un numéro Siret qui fait de moi une entrepreneuse individuelle. Ça peut paraître anodin comme ça, mais ça veut dire créer une entreprise et tout de suite, ça prend une autre envergure.
Pour faire simple, tu es artiste à partir du moment où tu crées des œuvres d’art. C’est la base. Mais à partir du moment où tu vends tes créations, tu ne peux pas rester sans statut. Tu dois te déclarer dès le premier euro perçu. Cela implique deux choses :
Tu as des obligations fiscales
Tu déclares tes bénéfices professionnels d’artiste (BNC) en complément de tes autres revenus.
Tu as des obligations sociales
Meet your new friend : L’URSSAF-Limousin devient ton nouveau pote, celui dont tu ne veux pas vraiment près de toi, mais qui ne te lâche jamais. Chaque trimestre, il attend de toi que tu verses tes cotisations sociales (Santé, vieillesse, contributions etc.). Il devient organisme collecteur à la place de La Maison des Artistes, qui conserve son rôle associatif et Sécurité sociale.
Réjouis-toi ! Tu es un artiste pro au sens du Code général des impôts.
Concrètement, comment s’inscrire ?
Ta décision est prise : tu veux devenir artiste professionnelle et vendre tes oeuvres dans les règles de l’art. Félicitations ! Ta première étape passe par le Centre de formalité des Entreprises dédié aux artistes-auteurs, à savoir le CFE-URSSAF (oh la la, tu as vu ? Il est déjà là !)
Petite astuce avant de commencer : prépare un scan de ta carte d’identité sur lequel figureront la date et la mention : certifié conforme à l’original). Le site te la demandera à la fin de ton enregistrement pour valider ton dossier en ligne.
Le site du CFE-URSSAF s’occupe des professions libérales, dont font partie les artistes-auteurs. Tu t’inscriras donc en passant par l’onglet susnommé.
- Accueil du site > va dans l’onglet Déclaration CFE
- Une fois que tu as cliqué sur l’onglet artiste, auteur, regarde l’onglet déclarer une formalité dans le menu qui vient d’apparaître à gauche et clique sur professions libérales ou assimilées, artiste-auteur.
- Sélectionne > un début d’activité
Te voilà lancée. Coche la case artiste-auteur en haut du formulaire. Ensuite, si tu as déjà été entrepreneuse auparavant (mais que tu ne l’es plus !) coche oui sur la petite case concernée. Ainsi tu pourras indiquer le numéro Siret que tu possédais à l’époque pour qu’il te soit réattribué.
Si tu n’as jamais exercé d’activité indépendante auparavant, ignore cette case.
Les questions suivantes ne devraient pas te poser de difficulté particulière. La date de début d’activité devrait en principe être celle de ta première facturation.
L’option EIRL (entreprise individuelle à responsabilité limitée) ne te concernera probablement pas, à moins que tu veuilles sécuriser ton patrimoine immobilier au cas où ton activité t’endetterait lourdement. Le statut de l’EIRL permet, en cas de faillite, de protéger tes biens personnels qui sont séparés de ton patrimoine professionnel.
Sachant que si tu es propriétaire de ta résidence principale, celle-ci n’est plus saisissable depuis 2015 par des créanciers dont les droits sont issus de ton activité professionnelle. Donc, bon, l’option EIRL n’est pas forcément adaptée à tout le monde, ne t’inquiète pas de ça maintenant.
L’option fiscale
BNC, déclaration contrôlée ? Que choisir ?
Le plus simple si tu constates que tu as très peu de charges (loyer d’atelier, frais professionnels divers, investissement en matériel conséquent), c’est le régime micro BNC. Tu déclares tes revenus encaissés sur ta déclaration et les impôts appliquent directement un abattement de 34 % sur ce montant pour tenir compte de tes frais. Tu ne payes donc tes impôts que sur 66% de ce que tu as vraiment gagné.
Par contre, si tu sais que tes frais vont être importants et que tu veux qu’ils soient déduits précisément, c’est le régime de la déclaration contrôlée qu’il te faut. Et peut-être un comptable pour t’aider à déterminer ce que tu peux déduire ou non. Il faudra conserver toutes les factures de tes achats (et comme dirait Stéphanie, de J’aime la Paperasse :
« Un ticket de caisse est un justificatif de paiement, mais en aucun cas une facture ! »
La TVA
Cauchemar des entrepreneurs, la TVA exige la tenue d’une comptabilité irréprochable. Coup de bol, tu peux choisir la franchise en base de TVA en tant qu’artiste, ce qui te permet de ne pas t’en soucier jusqu’à certains seuils de revenus.
« Pour bénéficier de la franchise en base de TVA, le chiffre d’affaires annuel hors taxes ne doit pas dépasser 44500 € pour :
les revenus des artistes-interprètes ;
les revenus des artistes auteurs ayant renoncé à la retenue à la source,
ou pour les autres revenus que leurs droits versés par les éditeurs (revenus accessoires, par exemple).
Les auteurs et artistes-interprètes bénéficient aussi de la franchise en base de TVA lorsque leur chiffre d’affaires de l’année civile précédente est inférieur à 17 700 €. »
Ne pas collecter la TVA implique cependant l’impossibilité de la déduire de ses achats.
Pense à préciser sur tes factures la mention suivante : « TVA non applicable – article 293 B du CGI »
Voilà, tu as coché toutes les cases, tu peux donc valider ton dossier en le signant et en joignant ta pièce d’identité. Quelques jours plus tard, tu vas recevoir un courrier de l’INSEE contenant ton numéro siret. Et encore un peu plus tard, un courrier de bienvenue de ton centre des impôts concernant un truc dont tu n’as peut-être jamais entendu parler : la CFE.
La CFE et les artistes :
Il faut savoir que tous les entrepreneurs doivent s’acquitter de cet impôt, qui est une sorte de taxe d’habitation pour les entreprises. Elle est exigible à la fin de l’année civile suivant la date de création de l’entreprise. Exemple, tu crées au 01.01.2020, elle est exigible en décembre 2021.
Mais !
Les artistes-auteurs sont exonérés de cette taxe. Donc lorsque tu recevras le questionnaire des impôts à propos de la CFE, renvoie leur le courrier en précisant :
En application du 2° de l’article 1460 du CGI, sont exonérés de CFE les peintres, sculpteurs, graveurs et dessinateurs considérés comme artistes et ne vendant que le produit de leur art.
Dernière étape mais pas des moindres :
Créer son compte sur le portail artiste-auteur de l’URSSAF
Comment te dire ? La mise en place du site par l’URSSAF a été chaotique. Le principe promettait d’être simple : les artistes répertoriés avant 2019 dans les fichier de la Maison des Artistes recevraient courant décembre un code leur permettant de se connecter à leur espace. Les artistes ayant démarré leur activité après 2019 devaient demander l’envoi de ce code d’activation.
Dans les faits, nombreux sont ceux à n’avoir reçu leur code qu’après d’innombrables relances. Aujourd’hui, si tu déclares tes revenus en BNC, le problème devrait être résolu.
Je t’invite donc, une fois ton siret reçu à créer ton compte sur le portail Artiste-auteurs Urssaf
Chaque trimestre, tu devras payer tes cotisations sociales sur cet espace. Compte 17,35% de retenues qui se composent de :
- La Cotisation vieillesse plafonnée : 6,90%
- La Cotisation vieillesse déplafonnée : 0,40%
- La CSG (Contribution Sociale Généralisée) : 9,2%
- La CRDS (Contribution au Remboursement de la Dette Sociale) : 0,5%
- La CPF (Contribution Formation Professionnelle) : 0,35%
Ce sont des éléments que tu dois absolument prendre en compte dans tes tarifs.
J’espère que cet article te donnera les éléments dont tu as besoin si tu aspires toi aussi à devenir artiste professionnelle. Je suis disponible pour échanger sur le sujet et partager mon expérience avec toi si tu le souhaites.
En attendant, je te conseille de lire cet article si tu souhaites savoir comment créer ta boutique en ligne.
Marie-Gaëlle
Artiste et écrivaine
Je peins des déesses, des sorcières et plus généralement la fantasy au féminin pour les fans de déco fun et décalée.
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