J’espère que tu me pardonneras cet article un peu particulier, mais j’avais vraiment besoin de poser des mots sur un événement qui m’a profondément marquée.
Lundi, j’ai appris en même temps que des millions d’internautes le décès de Qing Han, plus connue sous le nom de Qinni. Nous savions pertinemment qu’elle était gravement malade – elle avait annoncé publiquement le diagnostic fin décembre 2019 – et qu’il lui restait tout au plus un an, peut-être un an et demi à vivre.
Qinni n’était pas une « star » au sens propre du terme, mais elle avait rassemblé au fil des années une importante communauté d’artistes et de fans qui admiraient ses créations tout autant que sa personnalité drôle et combative. Sa disparition à 29 ans, bien plus tôt que ce que nous pouvions redouter, m’a bouleversée. Deux ou trois jours plus tôt, elle avait annoncé sur son Patreon qu’elle allait reprendre une sélection de ses anciens dessins, et les refaire afin de publier un artbook. Cela sonnait un peu comme un chant du cygne, mais j’étais heureuse de lire sa détermination, son envie de peindre malgré la fatigue et la douleur.
J’ai passé une partie de l’après-midi sous le choc et je crois que je n’étais pas seule dans ce cas. Le décès d’une personne aussi jeune, aussi inspirante et brillante que Qinni ne passe pas inaperçu. Une fois la sidération apaisée, j’ai décidé de replonger dans le fil de ses publications et je me suis rendu compte à quel point je lui suis redevable artistiquement parlant.
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C’est grâce à Qinni que je me suis lancée dans l’aquarelle.
Quand j’ai découvert son travail, je ne connaissais rien de cette technique. J’en possédais une boîte que m’avait offerte ma belle-mère quelques années auparavant, mais je ne l’avais que très peu utilisée, persuadée qu’il me faudrait des années pour apprendre à les utiliser correctement d’une part, et un peu rebutée par le contenu du livre fourni avec les peintures. Pour moi, aquarelle rimait avec paysages et calanques, des sujets qui ne me parlaient pas.
Autant dire que découvrir les œuvres de Qinni fut une révélation pour moi. On pouvait vraiment utiliser l’aquarelle de cette façon ? Elle a changé mon rapport à l’aquarelle grâce à ses œuvres subtiles, mélancoliques et colorées. J’ai commencé à tester, mélanger, comprendre comment l’eau entrait en jeu, à observer les pigments se placer par eux-mêmes au fil du pinceau.
Je n’ai plus jamais cessé d’expérimenter.
Qinni montrait intelligemment son travail
En parcourant son fil Instagram, j’ai pu voir l’évolution de son art au fil des années, noter les périodes où elle était absente, celles où elle récupérait des forces entre ses opérations. Je n’ai pas pu m’empêcher de noter avec quel talent elle « montrait son travail » (Austin Kleon approuverait certainement) et le documentait. D’une certaine façon, elle nous lègue un journal de bord d’artiste. Je pense que nous serons nombreux à venir y chercher du réconfort et de l’inspiration si la plateforme veut bien nous y laisser accès.
La relation de Qinni avec sa communauté représente pour moi tout ce qu’on trouve de beau et de positif sur internet. J’ai parfois tendance à voir les réseaux sociaux comme un monde sombre, remplis de trolls à l’affût, de débats stériles et de critiques incendiaires. Et puis je passe sur le compte de Qinni, et je me dis qu’il existe des ilôts où les gens sont paisibles, créatifs et bienveillants.
Elle me rappelle ce que j’ai envie de créer, à mon échelle.
Et je me sens mieux.
Merci Qinni.
Je ne la connaissais pas mais effectivement, ses illustrations sont superbes <3 j'espère que sa page restera en ligne pour continuer à inspirer d'autres artistes
Son frère a décidé de maintenir son compte Instagram en hommage. On est tous soulagés, ça aurait été dommage que son souvenir disparaisse brutalement.